
Johnny mis à part, s’il y a un artiste français qui fait l’objet d’un culte et d’une frénésie éditoriale depuis des années, c’est bien Serge Gainsbourg. Si en 2020, le confinement avait eu raison de votre volonté d’acquérir le splendide coffret de sept albums (1958-1970) malheureusement rapidement épuisé, vous pouvez vous rattraper avec les rééditions ultra-soignées de ses premiers albums.
A l’image de quelques autres « phénomènes musicaux » ayant traversés les époques et séduit plusieurs générations de mélomanes, le cas Gainsbourg est vu d’ici, un vrai trésor national. Une visite de la maison-musée Gainsbourg rue de Verneuil à Paris confirme que ce personnage haut en couleurs, en talent (et scandales), est définitivement inscrit au patrimoine culturel français. Art mineur, la chanson aimait-il claironer ? Ça se discute.
Sachant qu’une partie des enregistrements signés Gainsbourg est tombée dans le domaine public depuis quelques années, on peut raisonnablement dire que lorsque l’on met le nez dans les bacs, c’est un peu le grand fourre-tout. On y retrouve des compilations parfois racoleuses, des supposés inédits, des vinyles fabriqués à la va-vite, prétexte à vendre une belle pochette vintage de Gainsbourg aux touristes de passage.
Mais aussi toutes ces rééditions « officielles » qui, pour réduire les coûts de fabrication, rognent sur la qualité du produit fini : couleurs fades, photos basse définition, vinyle fin, carton de qualité médiocre… Un gachis quand il s’agit du format LP qui est aussi prisé pour son contenant.
Vinyles de Gainsbourg « à la une »
Rien de dramatique à l’heure de la dématérialisation (mieux vaut un vinyle corné qu’un vulgaire fichier – point de vue assumé de disquaire) puisqu’on le sait depuis longtemps, l’homme à la tête de chou fait vendre et en toute logique, on trouve dans ce qui concerne Gainsbourg à boire et à manger.
Alors quand on a vu que ses cinq premiers albums étaient repassés sur le billard d’une re-masterisation exigeante dans les studios d’Abbey Road par un cador de la gravure vinyle (Miles Showel), on s’est dit qu’il était peut-être temps d’en causer.
Si vous faites un tour sur les sites spécialisés, vous allez en effet trouver des centaines de copies des différentes éditions parues au fil des ans de cette première période d’enregistrements de Gainsbourg.
On parle ici d’enregistrements publiés entre 1958 et 1964, un temps où les appareils de lecture ou de diffusion (platine, radio, TV) ne fonctionnaient presque exclusivement qu’au standard mono. Et logiquement, les disques de cette époque étaient enregistrés dans cette optique de diffusion. D’où l’importance (la pertinence ?), même 60 ans plus tard, de ressortir ces albums dans la configuration de l’époque pour rester le plus fidèle possible à l’original. Car sous pretexte de modernité, l’industrie a petit a petit tout masterisé en stéreo, avec cette spacialisation du son qu’on pourrait qualifier de factice.
Rajoutez à cela un travail soigné de remasterisation effectué au cœur des mythiques studios anglais (Abbey Road) avec cette technique qui consiste à faire la gravure vinyle initiale à vitesse réduite (le fameux half-speed mastering). Un procédé permettant de récupérer et d’optimiser un maximum d’informations et les plus fines fréquences présentent sur des bandes master originales.
Lors de la sortie de l’intégrale mono en 2020, le même Miles Showel des studios Abbey Road expliquait tout l’intérêt du process. Le même que celui utilisé pour ces rééditions de 2025. Un truc que l’on pourrait considérer comme un délire pour « audiophiles », mais qui, à l’écoute sur une platine somme toute classique, fait vraiment la différence.
En bref, sauf si vos aïeux vous ont légué leur collection de 25 cm originaux, vous avez là une chance de démarrer ou compléter votre collection de vinyles avec un rapport qualité-prix sans équivalence.
On vous laisse réfléchir là-dessus mais pas trop longtemps, car toutes ces jolies galettes sont annoncées en éditions limitées apparemment. A vous de jouer.